Un arbre majestueux, verdoyant, un noyer plein de fruits, signale l’entrée du petit commerce de boissons et restauration rapide sur la voie verte à Montcy Notre Dame dans les Ardennes. » La noix verte », c’est le nom du petit snack de Jean-Marc. C’est devenu une halte réconfortante pour les promeneurs de la piste touristique à quelques kilomètres de Charleville-Mézières.
Une oasis de repos au milieu des jardins, avec en prime, une vue imprenable sur la Meuse qui borde la voie cyclable.
Le noyer sous les eaux
Mais tout n’a pas été aussi rose dans ce petit carré de verdure ouvert aux assoiffés. Construit en 2016, le commerce a reçu un coup d’arrêt deux ans plus tard avec une crue record de la Meuse. Les tables en bois, les bancs, les installations ludiques pour accueillir les clients, la cuisine, ont été emportées ou détruites par la montée des eaux. Jean-Marc Colignon, 53 ans, un ancien commercial en quête de nature, avait choisi cette nouvelle activité en pleine nature pour tirer un trait sur une vie trépidante.
Le temps de se relever, et c’est le virus, avec ses deux mois de confinement, qui va faire douter l’ardennais courageux.
Jean Marc Colignon. / © Daniel Samulczyk / France Télévisions
» Cette année, sans le confinement obligatoire, j’aurais pu travailler très tôt ! s’exclame-t-il un peu désabusé.
» J’ai été doublement pénalisé : comme tout le monde avec le confinement, et en plus, avec la fermeture de la voie verte qui était condamnée et fermée pendant la crue. Rien que cette année, il y a eu six ou sept inondations en plusieurs étapes ».
En quatre ans, j’ai connu deux grandes inondations, je me suis même dit à un moment donné que j’allais m’arrêter. Il faut toujours démonter, refaire, recommencer. Le pire, c’était en 2018, il y avait 1,60 m d’eau ici. Cette année, il y a eu à peu près 1,10 m, mais contrôler l’eau ou le feu, c’est impossible, on ne peut rien faire.
Jean-Marc Colignon, gérant de La noix verte à Montcy Notre Dame
Un petit paradis à préserver
Ce n’est pas un jardin extraordinaire, mais on y trouve une certaine quiétude, quand le soleil est de votre côté. Des herbes folles, des fleurs sauvages se mêlent au potager de Jean-Marc, quelques poules en sont les gardiennes.
Ici, tout est simple, du mobilier rustique fait maison, en passant par les aménagements extérieurs. Le luxe, c’est le silence des lieux, entrecoupé toutes heures par les cloches de l’église du village. Au pied de son arbre, Jean-Marc vivait heureux. Ce petit snack, c’était son idée.
Il poursuit : » Il n’y avait rien à l’origine ici. Il faut aller jusqu’à Bogny Sur Meuse pour trouver quelque chose, à moins de 20 km, il n’y a rien. Potentiellement, il y avait une offre intéressante à proposer. C’est plus orienté vers la bonne franquette. J’aime bien dire : ici, on vient vivre une petite parenthèse.
Il y a des cyclistes, de 7 à 77 ans, qui viennent boire une petite bière pour oublier les crampes du vélo. Le dimanche après-midi, c’est une clientèle plutôt familiale, le mercredi également. Le matin, c’est avant tout les grands sportifs qui courent ».
Mon activité me fait vivre une partie de l’année, ça fait plaisir aux gens, mais ce n’est pas un vrai métier. Je suis avant tout saisonnier.
Là, pour l’instant, ça sera de plus en plus minimaliste pour la restauration. Avec l’expérience et avec le temps, j’apprends. Je simplifie énormément les choses.Jean-Marc Colignon, gérant La noix verte, Ardennes
Sortir enfin la tête de l’eau
Ce samedi 6 juin n’est pas un jour de repos pour le gérant, il y a toujours quelques choses à améliorer. La petite victoire du moment, c’est le potager qui jouxte l’endroit. Jean-Marc pourra bientôt en faire profiter ses visiteurs.
En attendant, le principal, c’est de garder le moral, surveiller la prochaine crue hivernale, et vivre avec.
Il explique son ressenti de la situation : » C’est énormément de travail avant de pouvoir réouvrir. Il y a un phénomène qui est là, qui existe, on ne peut pas lutter contre, c’est la Meuse. C’est moi qui dois m’adapter par rapport à la nature désormais.
On se dit, on continue, on arrête. Les gens qui viennent ici, ne voient pas l’envers du décor.
Lorsqu’il y a les inondations, ils oublient vite tout ce que je subis. C’est vraiment le verbe subir. On sait que les inondations peuvent revenir tôt ou tard dans l’année. C’est la nature qui reprend ses droits. Il faut entretenir, il faut désherber, il faut que ce soit présentable. Maintenant, il faut que je mette tout à l’abri à chaque fois, lorsque les gros événements climatiques arrivent ».
Pourtant, à un moment donné, il y a eu un sentiment d’abandon. En fait, c’est la multitude de choses qui font qu’à un moment donné, l’usure arrive. Mais il y a eu une certaine solidarité qui s’est organisée sur les réseaux sociaux, j’ai été aidé. J’avais eu à peu près pour 8 000 € de dégâts, j’ai eu 1500 € d’aide.
Je n’attendais rien, j’ai eu ça, il n’y a eu aucune initiative venant de ma part, les gens apprécient juste l’endroit. C’est motivant, ça donne envie de continuer.Jean-Marc Colignon, gérant de La noix verte à Montcy Notre Dame
Pour la reprise, l’agencement de sa terrasse a été très peu modifiée. La place ne manque pas. Les distances réglementaires sont respectées, les gestes barrières sont bien rappelés. Dans un premier temps, La noix verte va proposer des boissons, des paninis, des croque-monsieur, des bières locales, du café, du thé.
Par la suite, pour des soirées spéciales, pour des événements particuliers, la friteuse reprendra du service, c’est promis.